Jacques Cauda : le blanc et le rouge Le trio du
Le trio du fantôme de Jacques Cauda est mené par un drôle de Gilles (de Watteau) auquel le héros a toujours voulu ressembler pour fuir sa jeunesse tout en gardant des oripeaux d'un Black Block : poignets de force hérissés de clous à têtes, lunettes octogonales et chaussures de parachutiste. Il fait sensation auprès de ses deux potes et se prend pour un phénix lorsqu'il entre dans des placard à mater pour voir celles qui créent en lui des éruptions lorsque, sous leurs collants, ils découvre leur volcan.
Peu à peu et au fil du temps en une telle histoire les verbes passifs passent au présent du héros. Un présent singulier et mythologique car tout n'est pas à prendre au premier degré. Les malfrats errent comme si l’amour était une petite pute et une grande misère dans un récit à la fois lent où tout le monde galope et rapide où certaines y bougent à peine.
Le sombre héros ne s’appartient plus et devient tueur. Quel dieu a enivré ou asséché ce Gilles pour le transformer en boucher ? L'auteur donne des pistes sans qu'une seule solution emporte la mise en un tel jeu de "quilles". Il fait entrer dans la danse macabre ou le gai savoir de ce semblable en un road movie qui tourne à la tourmente. Le blanc personnage du XVIIIème siècle se recouvre de rouge en un auto-portrait inversé. Les entrailles grouilles. S'y brisent des cuisses et des bouches se broient. Coeurs sensibles d'abstenir.
Jean-Paul Gavard-Perret
Jacques Cauda, "Fête la mort", éditions Sans Crispation, septembre 2020, 144 p.- 16 €