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jacques cauda
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25 octobre 2021

Surfiguration

Voici dans son intégralité KILLER OU LA PEINTURE INCARNÉE.

On y reconnaîtra Cauda le désosseur accompagné de son exécuteur Jean-Paul Gavard-Perret !

Concours hippo fotoloft_Cauda

 

Killer ou la peinture incarnée

Fidèle non seulement à sa réputation mais à ses conquêtes, Killer reste étalon d'or de l'empire des sens. Il se cache sous le Gilles de Watteau mais file bien vite dans les bals de Toulouse-Lautrec. Il a beau citer Juliette Greco : voilà déjà des Vénus. Il botte celles-ci. Et dès que pointent le bout de leurs seins surgit celui du promontoire du fier goéland. Histoire d'ébranler l'âme à tiers quand sonne le gland. Ce pourrait être l'image du paradis si sur les lunes le soleil n'était pas si plombant. Néanmoins les unions sont toujours libres sur les crêtes et pentes où débaroule le parfum exotique Bourjois avec un J comme joie. S'y scénarisent des maïeutiques entre mésanges charbonnières et l'oiseau noir d'un ciel à la van gogue. Il erre en attendant que le soir s'asseye sur le bord du chemin. Mais quand la lune sort sa circonférence, se transgressent bien des cadastres.  Des poux monts s'élancent fiers plus loin que la nuit.  Restent en conséquence bien des flammes qui brûlent là où dansent cuisses et popotins. De quoi faire du Killer un Charlie Gaule - moins luxembourgeois que coureur - dans des sillons pas forcément alpins pour grimper les cols de l'utérus ouverts hiver comme été. Les dames en leur toupet textile impriment de pli en pli des phrasés souples sur leurs poitrines.  Il les chérit de ses vœux sous velours ou satin, file en leur Q.G. dont il devine à tout coup le point G. Elles ne sont pas forcément précieuses. Et qu'importe les ridicules :  jouisseuses elles deviennent les plus convenables des partenaires.  En tapinois il attend louves, renardes, agnelles mais aussi des dames dites de joie dont il ne se prive pas.  Elles défilent pour tous les impairs à commettre en diverses ratières et version juxtalinéaire afin que l'Ulysse ne soit pas amputé de son odyssée.  Bref le flibustier des bustiers file du mauvais coton comme du plus que parfait sur les jambons que des résilles qui bâillonnent. Cette pratique d'une bijection et d'une communauté plus ou moins inavouable oblige tout dessous chic à tomber comme un cadavre sur un parquet ciré. Et cela ne date pas d'hier. Dès l’âge de onze ans il fit d’une de ses conscrites sa première si reine dont il releva le feston jusqu'à découvrir deux petites fesses à la peau penhélienne et rose thon.   Depuis, il ne s’économise jamais.  Qu’importe le flacon pourvu qu’il ait la Suissesse.  Ce n'est certes pas très dans l'air du temps. Mais qu'importe :  prenant son combi VW, autant en emporte le van car pour Killer chaque jour est Noël (mais après chaque fête il retire le sapin et remise les boules.) "Tu n'as pas fait que sucer ton pouce pendant que tu y étais." disent des bavardes, "Je n'ai rien vu venir il neigeait" répond l'agneau de prés salés et consentant lécheur de voie lactée.  Tombée au fond du puits son âme reste en équilibre sur une jarretière.  Dès son arrivée, des femmes merveilleusement vieilles la mettent sur leur mont de piété. L'hexamètre reprend alors ses pieds et ne possède qu'une anacrouse à faire expier en emboîtant des vies parallèles et superposées. 

À ses heures creuses Killer se demande ce dont il a besoin pour aimer. Un rapide tour de la question - lorsqu'il est en caleçon - ne laisse a priori pas supposer que ses outils manquent à l'appel et ses bonds d'yeux sur les seins prouve qu'il n'a rien d'austère. Mais il ne dit que là n'est pas le problème. Pour lui la question est autre : c'est une problématique d'équilibre entre gravité et pesanteur. Il faut dire qu'en dehors d'un physique flatteur, pour un tel pêcheur la science du comportement des atomes et des particules reste une spécialité majeure. Il suffit de lui affirmer qu'une femme possède de jolis yeux bleus pour qu'il rappelle à son excavateur que ce n'est là qu'une question de longueurs d'ondes. Dès lors comment ne pas estimer que les heures creusées possiblement par l'amour reste pour lui une barque sculptée dans l'air ? Cela permet en outre de comprendre - sans vouloir jouer les sophistes - combien Killer a du mal à vivre le vertige sentimental même s'il affirme que le bonheur qu'il vécut près de son premier amour rendit ivre jusqu'à son sommeil.  Force est de constater qu'il est malaisé de le contredire puisqu'il vécut une infinie tendresse et une douceur si intense que l'air autour de lui prit feu. Nous pouvons juste lui assurer que voir le désir à travers des bras qui ne sont plus là rend plus qu'hypothétique la possibilité pour un tel "il" d'une nouvelle Ève. D'autant que chacun sait qu'un visage premier cache ceux qui le suivent. Généralement il s'agit de celui d'une mère. Mais pour Killer il ne s'agit pas du visage de celle qui fit tout pour le pas l'avoir - tout sauf bien sûr le nécessaire.  Néanmoins, à son cœur brisé chacun s'oblige à donner de l'altitude. Certaines de ses amies sont prêtes à partager un morceau de leur beauté et de leur lit : mais il veut un amour entier. A savoir celui qui lierait ses jours pour le libérer de lui-même.  En parler à sa psy ne lui a même pas permis de boire le lait à la poitrine que celle-ci lui tendit en transgressant toutes les lois de l'analyse.  Comment dès lors lui faire comprendre qu'on va à l'amour comme on va au soleil ?  Pour le voir à midi à sa porte il suffit de se bronzer le cœur. Mais Killer est de ceux qui lisent l'heure dans les caves obscures où les démones frétillent et dans les pays où l'hiver est si long que l'astre du jour tarde à venir. Tant qu'il restera ainsi il sera de ceux qui cherchent l'amour et trouvent un village perdu. Cette erreur est humaine mais que peut-on faire pour lui ? Pour le rassurer il est bon de souligner qu'a trop appeler l'amour par son nom l'efface. Il convient en conséquence d'espérer que ses pensées finissent par le fatiguer et qu'il brise sa patience de bœuf pour que le taureau ailé rejaillisse. La seule pensée qui pourra l'enchanter demeure celle d'une poitrine qui a du poumon et monte aux lèvres avec le baiser.  Cette seule altitude peut amplement suffire.

 

Dans le ciel d'orage de sa tête, Killer bute sur des ombres lascives, voluptueuses, obscènes. De tels fruits de la passion voguent en plumes de cabaret. Leurs ongles au rouge Chanel griffent celui qui sans craindre rien, trouble les silences, les peints en rouge et noir - avant ou après avoir rendue aux rondeurs les honneurs qui leur sont dues. Killer joue l'as assassin mais ses prétendues victimes rigolent bien.  Derrière la pose altière du sombre minotaure qui renverse les beautés sur des rocs, son acier trempé s'il a l'éclat du verre n'est fait que pour la gloire du ciel de lit des fleurs égarées au col rose sous manteau noir. Pour autant le magnanime, jambes lourdes, mains abimées par ses mises en abyme, invente en ses tableaux des apophtegmes persévérants. Preuve que l'art permet une vie singulière rythmée d'aiguilles d'horloges. Elles cliquètent aux fièvres des maisons closes ou ce qui en tient lien. Nul ne sait si l'on change les draps après, mais sur les toiles du Killer il s'agit de dessiner au-dessus des décombres des nuits visibles et de l'invisible mort. Chaque fois se dit l'artiste : "allez, encore un effort", là où sa carotte cuit au dedans de celles qui sentent en cette mouture monter non la moutarde au nez mais une joie promise. De telles natures rendent l'existence vive et le peintre en son humble bure de peau vive rend à de tels émois d'immortels échos. Ombres, velours et moires : tout est prêt pour un strip-tease qui n'est pas que de l'âme.  Car dès que Killer s'installe la vie n'est pas ailleurs et des pipes se taillent. Elles rendent forcément toute parole improbable sauf à de quelques interjections en "oh" et "ah". Mais la main de Killer s'active, au fusain ou avec pinceaux et tubes. Il y a là un peu du bleu silence du Greco mais surtout des chairs roses en ces endroits où la chose se passe jusqu'au petit trépas. Devant les femmes le peintre et poète - hanté du poison doux de l'antre, jamais las du son des couleuvres qui s'avalent dans la pénombre, besogne. Des servantes au grand cœur dont il n'est pas jaloux, il déguste leurs volumineuses légumineuses et s'agrippe à leurs flancs de mercure. Rien ne peut s'écailler de peur ou d'inquiétude en ce qu'il crée. Le bel ouvrage ajoute au monde un dessein de cruelle beauté.

 

Killer contemple la terre, voit au plus profond de l'âme, devant lui le "je suis" d'âge en âge qui chuchote à voix basse telle une auréole de plus en plus rare. Il voit aussi des visages fins comme des flammes et aussi ceux d'en bas en mal d'aube et qui ne résistent pas. Brille le bombement de leurs cuisses cuirasses qui font lever un certain doigt. Aucun cri n'ajoute à la cruauté de la scène. Les filles de joie deviennent saintes aux longs cheveux, les yeux tournés vers la lumière. Elles s'abandonnent même lorsque leurs seins sont coupés par une lame tranchante.   Dans un coin, des sœurs agenouillées récitent des prières. Et un secret s'apprête à rompre l'histoire sainte. C'est un saut vers l'autre monde par celui qui effectue celui de l'ange. Hors des flancs du melon les pépins sont ruisselants. Killer donne ainsi sa leçon de peinture qui chasse la vertu et combat l'insoumission des têtes indociles.  Beau sang coule à la nuit. File ainsi la sagesse quittant le secret abri de la fleur, jolie vraie fille de musique.  Au pinceau de silence, l'autre silence, figure de l'ouvert.  Longuement le Killer reste ensuite face à la mère. De son canotier il salue un marin qui passe sur elle et rentre son poignard que la besace embrasse, le sortant de la lumière qui aveugle. A la nuit de dedans murmure des mots perlés et les beaux secrets de l'invisible. Rien n'abrège l'espérance et l'orgueil. Vivre, se dit Killer, c'est un peu de bruit et de fureur histoire de nous regarder passer en noumènes et en exécuteur des heures.

Jean-Paul Gavard-Perret

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